Comment la sécurité psychologique fait émerger l’intelligence collective dans votre entreprise ?

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Comment la sécurité psychologique fait émerger l’intelligence collective dans votre entreprise ?

Note de l'auteur

Nous vous l’avions annoncé ! Voici la présentation de The Fearless Organization d’Amy Edmonson. Denis Migot est à nouveau invité sur Scrum Life pour vous parler de ses lectures inspirantes et utiles. Celle-ci est l’occasion de comprendre en quoi la sécurité psychologique est une condition indispensable au bien-être et à l’efficacité d’une équipe. Complétez votre bibliothèque et votre veille agile avec ses suggestions d’ouvrages qui méritent votre attention et agradent vos compétences sur de multiples sujets connexes à l’agilité.

Table des matières

Introduction

Les personnes au sein de votre équipe ou de votre entreprise sont passives, s’expriment peu ou partagent peu ? Pas de panique ! J’ai un livre pour vous ! The Fearless Organization d’Amy Edmondson qui explique notamment pourquoi il est inutile d’investir du temps et de l’argent dans le recrutement de personnes pour qui il est impossible d’être force de proposition et de challenger l’existant, bref, de participer à la réflexion collective de l’entreprise.

Je m’appelle Denis Migot, j’accompagne au quotidien des équipes et des entreprises dans leur volonté de mieux faire en les aidant à trouver des réponses collectives à leurs problèmes. Je suis très heureux de participer à la chaîne Scrum Life, la première chaîne francophone qui parle de l’esprit agile sans détour, sans tabou et avec humour. J’en profite pour remercier toute l’équipe Scrum Life ainsi que toute sa communauté qui la soutient notamment grâce à ses dons.

Présentation du livre The Fearless Organization

The Fearless Organization est un ouvrage écrit en 2018 par Amy Edmondson et se veut être un guide pour instaurer pas à pas une sécurité psychologique au sein d’une équipe et d’une entreprise.

Amy Edmondson est une chercheuse américaine en leadership, en équipe et en apprentissage organisationnel. Elle est actuellement professeur de leadership à la Harvard Business School. Elle est l’auteur de sept livres et de plus de 75 articles et études de cas.

Qu’est-ce que la sécurité psychologique ?

La sécurité psychologique correspond au fait de pouvoir s’exprimer, de donner son avis contradictoire ou non et de partager ses idées sans craindre d’en subir des conséquences comme être pointé du doigt, être mis au placard ou même être licencié. C’est donc le fait de pouvoir être écouté, entendu et respecté quel que soit son statut, son ancienneté, son genre ou ses origines. Patricia Ridell, professeure en neuroscience, résume tout l’intérêt de la sécurité psychologique en entreprise avec cette simple phrase :

« Quand nous ne nous sentons pas en sécurité nous gâchons une grande part de notre énergie à tenter de protéger notre identité au travail »

Au sein d’une entreprise, disposer d’un environnement assurant une sécurité psychologique est CAPITAL. Au-delà du sentiment indispensable de confiance, d’écoute et de considération que cela témoigne, la sécurité psychologique est une condition indispensable pour favoriser l’intelligence collective. Si vous souhaitez aller plus loin sur ce sujet de l’intelligence collective et notamment sur la prise de décision en groupe, je vous invite à regarder l’excellente conférence d’Olivier Sibony intitulée Comment éviter les biais cognitifs pour prendre la bonne décision ?, c’est l’occasion d’apprendre trois techniques pour faciliter la prise de décision en groupe :

  • Partager des éléments démontrant que l’option envisagée est une erreur
  • Permettre aux participants d’exprimer des désaccords
  • Fixer des critères explicites

Comment la sécurité psychologique se matérialise au sein d’une équipe ?

La découverte de la sécurité psychologique par Amy Edmondson

Amy Edmondson a découvert la notion de sécurité psychologique durant son doctorat. Elle réalisait une étude au sein de 7 hôpitaux sur les erreurs médicales et notamment sur leurs effets au sein des équipes. Après analyse elle s’est rendu compte de l’existence d’une corrélation entre le nombre d’erreurs commises par une équipe et l’efficacité de cette même équipe. Contre toute attente, plus une équipe s’avère efficace, plus elle semble faire d’erreurs. Cela paraît contradictoire et pour cause, la réalité était tout autre. Les équipes les plus efficaces ne faisaient pas plus d’erreurs mais les déclaraient plus facilement. Cette aisance à partager des difficultés permet à une équipe de lancer des conversations et de réfléchir collectivement à comment s’améliorer.

L’élément fondamental à retenir ici est le suivant : la peur n’est pas un levier de collaboration, de motivation ou de performance. Amy Edmondson explique d’ailleurs que les recherches en neuroscience indiquent que la peur consomme des ressources physiologiques au détriment de parties du cerveau gérant la mémoire et le traitement de nouvelles informations. Elle partage également des études montrant comment une culture d’entreprise basée en partie sur la peur et la compétitivité entre salariés a eu des conséquences humaines et économiques dramatiques pour les sociétés Volkswagen, Nokia et Wells Fargo.

La découverte de la sécurité psychologique par Amy Edmondson

Amy Edmondson explique qu’une approche possible peut-être d’interroger individuellement ou collectivement les salariés. Nous pouvons par exemple leur présenter différents scénarios et leur demander quelles seraient leurs réactions face à une situation donnée. Dans un contexte de défiance des salariés vis à vis de leur entreprise, il peut-être plus opportun de recueillir les informations via un sondage en ligne et anonyme. Une autre approche peut-être de poser un ensemble de questions à travers l’animation d’un atelier. Voici quelques exemples de questions :

  • Est-ce difficile de demander de l’aide auprès des membres de votre équipe ?
  • Et auprès des personnes ne faisant pas partie de votre équipe ?
  • Est-il prudent de prendre des risques au sein de votre équipe ou de l’entreprise ?
  • Les différences et les contradictions sont-elles facilement acceptées au sein de votre équipe ?
  • Si vous faites une erreur, vous est-elle reprochée ?
  • Comment réagissez-vous lorsque vous ou votre équipe faites face à un problème ?

Ces questions ne sont évidemment pas exhaustives. Elles doivent être le point de départ d’une réflexion collective sur l’amélioration de l’organisation du travail et de la culture d’entreprise. Elles sont aussi l’occasion d’aborder des sujets indispensables à la fois au bien-être des salariés et à la prospérité de l’entreprise : les sujets de l’autonomie des salariés, de leur responsabilité, de leur imputabilité, de leur implication ou encore de leur pouvoir décisionnel.

Si vous souhaitez en savoir plus sur ces thèmes je vous recommande les livres The Responsibility Process de Christopher Avery ou encore L’insoutenable subordination des salariés de Danièle Linhart qui met notamment en garde contre les dérives et limites des modes managériales misant sur une autonomie toute relative des salariés.

Comment mettre en place la sécurité psychologique ?

Le sujet étant très vaste je ne peux tout détailler dans cette vidéo, je vais donc plutôt me concentrer sur trois notions qui me semblent incontournables.

  • La vulnérabilité : pouvoir s’exprimer librement signifie pouvoir partager ses craintes, ses limites et ses erreurs sans avoir peur d’être jugé. Cela nécessite de la part des personnes faisant figure d’autorité de montrer l’exemple. Au sein d’une équipe cela peut également nécessiter la mise en place de moments d’échanges où chacun va pouvoir partager des faiblesses personnelles puis être aidé par le collectif pour les surmonter.

Pour en savoir plus sur le sujet je vous invite à vous rendre sur le blog orygin.fr dans lequel Paul Devaux détaille l’atelier intitulé Vulnérabilité en coaching d’équipe.

  • L’écoute : s’exprimer c’est aussi pouvoir être entendu. Le plus fondamental dans la contribution à la sécurité psychologique tient dans sa capacité à se taire. L’écoute permet en effet de comprendre, de créer des conversations, de réfléchir, de découvrir la réalité du fonctionnement de l’entreprise et de faire émerger des opportunités. Elle permet d’ébranler ses croyances et d’entendre le quotidien des acteurs de votre entreprise. Pour en savoir plus sur le sujet de l’écoute je vous invite à vous renseigner sur le sujet de l’écoute active, il y a pléthore de vidéos et d’ouvrages sur le sujet

Je vous invite également à lire l’excellent livre La crise de l’intelligence du non moins excellent Michel Crozier où plusieurs pages sont consacrées à l’importance de l’écoute.

  • La confiance : il s’agit du lubrifiant de la sécurité psychologique. L’instauration de la confiance passe par une reconnaissance de sa vulnérabilité mais aussi par l’acceptation des critiques ou contradictions, par la fidélité à la promesse donnée et donc par la prédictibilité de ses comportements.

Pour aller plus loin sur le sujet, je vous invite à lire deux ouvrages : le livre de François Dupuy On ne change pas les entreprises par décret où plusieurs pages sont consacrées au sujet de la confiance ainsi que l’excellent article d’Eric Simon publié sur le site du cairn intitulé La confiance dans tous ses états.

La sécurité psychologique n’est pas une fin en soit

S’il est difficile au sein d’une entreprise de partager des idées, de donner son opinion ou d’être entendu, l’innovation et le bien être des salariés sont alors menacés. La capacité de l’entreprise à créer son avenir devient difficile. Toutefois, si la sécurité psychologique s’avère indispensable pour remédier à cela elle n’est pas une finalité mais un socle. Elle doit s’accompagner d’une remise en cause de l’unilatéralité des modalités de prise de décision, de la définition des objectifs et des constructions de la structure et de l’organisation de l’entreprise.

Attention toutefois à ne pas basculer dans l’extrême en voulant tout observer par le prisme de la sécurité psychologique. C’est d’ailleurs une critique que nous pourrions formuler sur l’approche d’Amy Edmondson. Elle s’est notamment exprimée il y a quelques temps sur les deux accidents des 737 max en expliquant que ces crashs survenus en 2019 étaient liés à une absence de sécurité psychologique au sein de Boeing. Même si nous pouvons l’entendre, les causes sont multiples et la réalité bien plus complexe. Causes et symptômes s’entrelacent.

Un autre point de vue, celui de Dominique et Alain Schnapper au sein de l’excellent livre Puissante et fragile, l’entreprise en démocratie, montre que ces accidents sont la conséquence d’un management financiarisé où la sécurité et la qualité deviennent secondaires face à une recherche effrénée de profits.

La sécurité psychologique est une base incontournable mais doit être considérée que comme une première étape vers une refonte de l’entreprise comme une entité collective dans laquelle chaque salarié, quel que soit son niveau hiérarchique et l’instance décisionnaire, peut être représenté, respecté, responsabilisé et entendu.

J’espère que cette présentation rapide de la notion de la sécurité psychologique et du livre d’Amy Edmondson vous aura donné des idées pour accompagner une équipe ou une entreprise dans leur évolution. N’hésitez pas à m’indiquer en commentaires ce que vous en avez pensé.

Ne ratez pas notre prochain épisode présentant le salaire de la peine de Sylvaine Perragin

Dans un prochain épisode j’évoquerai le livre Le salaire de la peine de Sylvaine Perragin, cela sera l’occasion de parler de management et de souffrance au travail.

Faites votre veille : Sources et liens complémentaires

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